À partir du 1er janvier 2023, entrera en vigueur le nouveau droit des obligations : quel impact en droit de la construction (questions choisies)

17 octobre 2022 - Droit immobilier

À partir du 1er janvier 2023, entrera en vigueur le nouveau droit des obligations : quel impact en droit de la construction (questions choisies)

La loi du 28 avril 2022 portant le livre 5 « Les obligations » du Code civil a été publié au Moniteur belge le 1er juillet 2022. Elle entre en vigueur le 1er janvier 2023 (le premier jour du sixième mois qui suit celui de sa publication au Moniteur belge).

 

Quelle incidence aura ce nouveau droit des obligations en cas d’inexécution par l’une des parties d’un contrat d’entreprise ?

 

  1. Enumération des sanctions

Une des nouveautés consiste dans l’énumération systématique des sanctions de l’inexécution de l’obligation contractuelle à l’article 5.83 de Code civil lequel dispose que :

 

« Sauf volonté contraire des parties, le créancier dispose des sanctions suivantes en cas d’inexécution imputable au débiteur:

1° le droit à l’exécution en nature de l’obligation ;
2° le droit à la réparation de son dommage;
3° le droit à la résolution du contrat;
4° le droit à la réduction du prix;
5° le droit de suspendre l’exécution de sa propre obligation.
Les sanctions qui sont incompatibles ne peuvent être cumulées.
»

 

La tâche du praticien est ainsi simplifiée et encadrée contrairement à la matière en vigueur au jour de la rédaction de la présente qui se trouve éparpillée dans le Code civil, la jurisprudence et la doctrine.

 

Il faut préciser que ces sanctions sont supplétives (« sauf volonté contraire des parties ») de telle sorte que les parties à un contrat sont libres de les aménager comme elles le désirent sauf lorsqu’elle sont en présence de dispositions impératives ou d’ordre public comme certaines dispositions protégeant le consommateur.

 

On aura aussi relevé une « nouvelle » sanction, s’agissant de la réduction du prix qui permet de maintenir un contrat en cours et de rééquilibrer les obligations réciproques.

 

  1. Unilatéralité de la mise en œuvre de certaines sanctions

 

Conscient de l’inadéquation entre d’une part, l’obligation de recourir à une décision de justice et d’autre part, le besoin de rapidité dans la pratique, le législateur a introduit dans le Code civil la résolution par notification du créancier.

En d’autres termes, même en l’absence d’une clause résolutoire expresse contenue dans le contrat, « après avoir pris les mesures utiles pour établir l’inexécution du débiteur, le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par une notification écrite au débiteur. Celle-ci indique les manquements qui lui sont reprochés. » (article 5.93)

Ce droit demeure soumis au contrôle a posteriori par le juge, lequel vérifiera si les conditions ont bien été respectées et s’il n’a pas été mis en œuvre abusivement.

 

Dans le même esprit d’unilatéralisme, il est désormais permis, en cas d’urgence ou d’autres circonstances exceptionnelles, de procéder au remplacement par voie de notification de son cocontractant.

 

Il s’agit incontestablement d’une avancée importante qui, dans la pratique permettra au créancier d’une obligation contractuelle de remplacer son débiteur par simple courrier alors que dans la pratique actuelle, une décision de justice était nécessaire.

Le livre 5 codifie aussi le principe général de droit de l’exception d’inexécution, s’agissant indubitablement de l’un des principes le plus fréquemment utilisé en pratique consistant dans le droit à suspendre son obligation jusqu’à ce que le débiteur exécute ou offre d’exécuter sa propre obligation à un contrat dont les obligations sont réciproques (article 5.239 du Code civil).

 

Une autre importante innovation consiste dans le droit accordé au créancier de suspendre l’exécution de son obligation pour une inexécution future de son débiteur et si les conséquences de cette inexécution sont suffisamment graves pour lui.

Il s’agit du cas où le maître de l’ouvrage a de sérieuses raisons de craindre que l’entrepreneur ne finira pas son chantier à la date convenue, il sera alors autorisé à suspendre le paiement de ses factures.

 

  1. La mise en demeure

 

L’ancien Code civil faisait déjà largement référence à la mise en demeure ; le nouveau Code précise davantage sa définition, sa forme et son contenu aux articles 5.231 et suivants.

 

On relèvera la codification de la mise en demeure pour inexécution future, pourvu qu’elle soit suffisamment proche de l’échéance. Cette mise en demeure produit ses effets après l’échéance du terme.

Cette disposition peut être utile pour une entreprise générale, ayant constaté le retard accumulé par son sous-traitant sur le chantier A, qui pourra adresser une mise en demeure pour le chantier B dont la date de fin des travaux est proche.

 

En résumé, l’intégration de l’évolution jurisprudentielle et doctrinale de l’unilatéralisme et de l’anticipation d’inexécution future dans le Code civil apparaissaient nécessaire face à un besoin croissant d’immédiateté en pratique.

 

 

Alexandru Lazar

17/10/2022